Chambre de recours des Ecoles Europeennes dismissed our case

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Recours 12/ 74
M Mackenzie et consorts
CHAMBRE DE RECOURS DES ECOLES EUROPEENNES
(1ee section)
Décision du 19 décembre 2012
Dans l’affaire enregistrée sous le n° 12/274, ayant pour objet un recours introduit par M. Mackenzie et 21 autres parents d’élèves, ayant élu domicile auprès du cabinet de leur conseil, Maître François Moyse, sis à L-1026 Luxembourg, boulevard Joseph II, 2 a, BP 2648 et tendant à la réformation ou, subsidiairement l’annulation de la décision du Secrétaire général des Écoles européennes du 5 septembre 2012 rejetant le recours administratif des parents contre les décisions du Conseil supérieur des Écoles européennes (EE) prises lors de ses réunions des 21 et 22 octobre 2003 et 15 mars 2004, par lesquelles ce dernier a respectivement adopté une séparation « verticale » pour les deux écoles de Luxembourg et a réparti des sections linguistiques entre ces deux écoles.
la Chambre de recours des Ecoles européennes, composée de

  • M. Henri Chavrier, président de la Chambre de recours et de la section,
  • M. Eduardo Ménendez Rexach, membre,
  • M.Paul Rietjens, membre et rapporteur,

assistée de M. Andreas Beckmann, greffier, et de Mme Nathalie Peigneur, assistante juridique,

au vu des observations écrites présentées, d’une part, pour les requérants, par Me Moyse, avocat au barreau de Luxembourg, et d’autre part, pour les Écoles européennes, par Me Snoeck, avocat au barreau de Bruxelles,

après avoir entendu, à l’audience du 12 novembre 2012 le rapport de M. Rietjens, les explications de Me Moyse pour les requérants, et de Me Gillet pour les Écoles européennes,

a rendu le 19 décembre 2012 la décision dont les motifs et le dispositif figurent ci- après.

Faits du litige et arguments des parties

1. Les 22 requérants sont les parents d’élèves inscrits à l’École européenne de Luxembourg II. Cette dernière est l’une des deux Ecoles européennes à Luxembourg et a débuté ses activités à l’occasion de la rentrée scolaire 2004-2005. Dès le début, Luxembourg II était destinée à être localisée sur un autre site que Luxembourg I, mais jusqu’à la rentrée scolaire 2012-2013, les deux Ecoles ont toutefois coexisté sur le même site dit du « Kirchberg ». En septembre 2012, Luxembourg II a été finalement transférée à Bertrange-Mamer (sur le site dit du Tossenberg).

2. Déjà en 2003, le Conseil supérieur des Ecoles européennes (ci-après les « EE ») a examiné la question de la répartition des élèves entre les deux écoles. Lors de sa réunion des 21 et 22 octobre 2003, il a écarté l’option d’une répartition dite « horizontale », à savoir une répartition en fonction des cycles d’enseignement (maternel, primaire et secondaire) et a préféré, par 15 voix contre 2 avec 1 abstention, une répartition dite « verticale », à savoir une répartition en fonction des sections linguistiques et langues maternelles, chaque école comportant les trois cycles d’enseignement. Lors de sa réunion du 15 mars 2004, le Conseil supérieur a arrêté la répartition effective de 21 sections linguistiques entre les deux écoles : exception faite des sections allemande, anglaise et française présentes dans chacune des deux écoles, 10 autres sections linguistiques ont été attribuées à Luxembourg I et 8 à Luxembourg II. Enfin, après l’adhésion de la Bulgarie et de la Roumanie à PUE, le Conseil supérieur a décidé, lors de sa réunion des 17 et 18 avril 2007, de répartir ces deux nouvelles sections linguistiques respectivement entre Luxembourg I et Luxembourg II.

3. Les décisions susmentionnées du Conseil supérieur d’octobre 2003 et de mars 2004 ont fait à l’époque l’objet d’un recours formé par 65 parents d’élèves de Luxembourg II. Ce recours a été rejeté par la Chambre de recours sur base d’un rapport motivé de son Président du 24 novembre 2004, déclarant le recours irrecevable en raison de l’incompétence de la Chambre de recours pour en connaître.

4. Le 27 juillet 2012, à l’occasion du déménagement de Luxembourg II sur le site de Bertrange-Mamer, 62 parents d’élèves déjà inscrits à Luxembourg II, ont à nouveau introduit un recours — administratif cette fois-ci — contre la répartition dite « verticale » des élèves entre les écoles de Luxembourg I et Luxembourg II. L’objectif du recours était d’obtenir du Secrétaire général des EE la révision de ce mode de répartition. Ce recours a été rejeté par décision du Secrétaire général du 5 septembre 2012, le déclarant irrecevable et au surplus non fondé. C’est contre cette décision de rejet qu’est dirigé le présent recours contentieux émanant de 22 requérants.

5. A l’appui du présent recours, les requérants présentent d’abord des moyens relatifs à la recevabilité de leur recours administratif.

Les motifs d’irrecevabilité invoqués par le Secrétaire général étaient que
(a) le recours administratif se heurtait à l’autorité de la chose jugée ;
(b) les requérants disposaient chacun d’une possibilité de recours contre les décisions individuelles d’inscription de leurs enfants, possibilité qu’ils n’avaient pas utilisée dans les délais
(c) concernant un éventuel recours contre la règle de portée générale sous- jacente aux décisions individuelles, force était de constater que le délai pour un tel recours était également largement dépassé et qu’en tout état de cause, les requérants ne pouvaient établir qu’ils agissaient pour protéger un droit ou une prérogative que la Convention portant statut des EE leur reconnaîtrait.
Au titre du premier moyen, les requérants réfutent l’argument tiré de l’autorité de la chose jugée en faisant valoir que ce principe de droit n’est applicable qu’aux seules personnes ayant déjà été parties dans le cadre d’une précédente procédure basée sur des revendications identiques. Or, force est de constater qu’en l’espèce, selon les dires des requérants, la majorité d’entre eux n’a été ni partie, ni représentée à l’occasion du recours introduit en 2004.
Au titre du deuxième moyen, les requérants réfutent l’argument tiré du fait qu’ils n’ont pas ou plus la possibilité d’introduire un recours contre une décision de portée générale, en arguant que :
– à la lumière d’une décision de la Chambre de recours du 22 juillet 2010, par laquelle cette dernière a interprété sa compétence de manière plus extensive qu’en 2004, ils remplissent désormais toutes les conditions énoncées par cette décision pour introduire un recours contre une décision à portée générale ;
– en effet, il est démontré que les décisions attaquées du Conseil supérieur ainsi que l’inaction de la Direction des EE, non seulement affectent directement des droits que la Convention portant statut des EE leur reconnaît, mais violent en outre de nombreuses normes juridiques, consacrées dans plusieurs instruments européens et internationaux et prohibant toute forme de discrimination ou conférant des droits fondamentaux ;
– aucun doute n’est permis quant au fait qu’ils constituent bel et bien une catégorie de personnes se distinguant de l’ensemble des autres personnes concernées ;
– il n’était aucunement certain, comme l’exige la jurisprudence de la Chambre de recours, qu’ils aient été en mesure de former un recours contre les décisions individuelles prises sur le fondement des décisions générales visées, en ce que le Règlement général n’autorise de tels recours que dans les seuls cas de vice de forme ou de fait nouveau et pertinent postérieurs à l’inscription ; à ce sujet, les requérants soulignent qu’ils n’entendent nullement soulever des « vices de forme » au sujet des décisions individuelles d’inscription, ni invoquer de fait nouveau ;

Au titre du troisième moyen, les requérants réfutent l’argument tiré de l’ancienneté des décisions du Conseil supérieur qui empêcherait désormais toute possibilité de recours, en soutenant qu’ils entendent avant tout faire cesser une situation inique dont ils sont actuellement les victimes, raison pour laquelle ils dénoncent l’illégalité des décisions attaquées et le « refus obstiné », selon leurs dires, de la Direction des EE d’agir en vue d’y mettre fin.

6. Ensuite, quant au fond, les requérants exposent trois moyens. A cet égard ils qualifient d’erronées les observations du Secrétaire général à l’appui de sa décision de rejet de leur recours administratif.
Un premier moyen est pris de la violation de l’intérêt supérieur de l’enfant, consacré entre autres dans des instruments internationaux applicables en l’espèce, en ce que les enfants se voient obligés de supporter les méfaits du système de répartition actuel et notamment les nombreuses contraintes en matière de transports et d’horaires auxquelles en partie les élèves les plus jeunes seront désormais confrontés, même si la distance séparant les deux écoles ne fait que 12 km.. De plus, selon l’article 24 de la CEDH, la prise en compte de l’intérêt supérieur de l’enfant doit être une considération primordiale dans tous les actes relatifs aux enfant et la prise en compte de leur bien- être doit donc prévaloir sur l’argument, avancé par les EE, de la nécessité d’un réaménagement des locaux des deux écoles en cas d’adoption d’un système de répartition « horizontale » et les dépenses que cela engendrait.
Un deuxième moyen est pris de la violation de l’article l de la Convention portant statut des EE , en ce que ces dernières ont comme mission d’assurer « l’éducation en commun d’enfants du personnel des Communautés Européennes» et que la répartition « verticale » des élèves entre Luxembourg I et Luxembourg II conduit à ce qu’aucune des deux écoles ne comprenne l’ensemble des sections linguistiques, ce qui contrevient clairement audit objectif.
Un troisième moyen est pris de la violation des principes d’égalité et de non discrimination. A ce sujet, les requérants rappellent que, lorsqu’une autorité est amenée à devoir traiter inégalement des catégories de personnes, cette différence doit s’appuyer sur la base de critères objectifs, faute de quoi elle constitue une discrimination prohibée. Les requérants soulignent que, dans le cas d’espèce, les EE n’apportent aucune justification objective au fait que, suite à la répartition choisie, ce soient certaines sections linguistiques déterminées qui doivent faire face à un traitement défavorable plutôt que d’autres, ce qui est donc clairement discriminatoire. En se référant à la jurisprudence de la Chambre de recours de août 2010, invoquée par le Secrétaire général et justifiant le regroupement dans une même école de tous les élèves d’une même nationalité et langue maternelle, les requérants font valoir que tout d’abord cette jurisprudence ne concernait que les élèves SWALS et qu’ensuite il convient d’en déduire a contrario que la répartition d’élèves de même nationalité ou de même langue au sein de différentes écoles dans la même ville, ce qui est le cas à Luxembourg pour les élèves des sections allemande, anglaise et française, constitue donc bel et bien une discrimination. Ils concluent qu’en décidant arbitrairement d’affecter une catégorie d’élèves sur un site éloigné et moins bien desservi, en fonction seulement de leur appartenance à une section linguistique, les EE appliquent à des élèves se trouvant dans des situations comparables, un traitement inégal et injustifiable.

7. Les requérants demandent donc à la Chambre de recours de déclarer leur recours recevable et fondé, de réformer, sinon d’annuler, la décision du Secrétaire général du 5 septembre 2012 et de statuer en ce que chaque partie supporte ses propres dépens.

8. Dans leur mémoire en réponse, les EE ne contestent tout d’abord pas la recevabilité du recours contentieux, pour autant qu’il ne vise que l’annulation de la décision du Secrétaire général du 5 septembre 2012.
9. Ensuite, les EE réfutent d’abord les moyens des requérants opposés à la décision du Secrétaire général de déclarer leur recours administratif irrecevable.

Analysant tant l’objet du recours administratif – tendant à contester des décisions de portée générale prises par le Conseil supérieur — que l’évolution de la jurisprudence de la Chambre de recours suite à ses décisions du 15 septembre 2005 et du 22 juillet 2010 – par lesquelles cette dernière a étendu sa compétence en la matière -, les EE ne peuvent que constater que c’est manifestement à bon droit que la décision du Secrétaire général a rejeté le recours administratif comme irrecevable. Les EE concluent en effet de ladite analyse que toutes les décisions prises par les directions des écoles de Luxembourg sur les demandes d’inscription qui, nécessairement, faisaient application des décisions litigieuses du Conseil supérieur, auraient pu être contestées par les requérants ainsi que le permet l’art 50bis du Règlement général. Eu égard à la jurisprudence de la Chambre de recours depuis juillet 2007, suite à laquelle la notion de « vice de forme>) doit être entendue largement, les requérants auraient pu soulever une exception d’illégalité de ces décisions et ainsi obtenir par voie incidente ce qu’aux termes de l’article 27 § 2 de la Convention, ils ne peuvent en principe obtenir par voie principale.
Les EE poursuivent en argumentant que, même si la Chambre de recours estimait pouvoir censurer les décisions du Conseil supérieur en cause par voie principale, encore faudrait-il considérer, comme le fit à bon droit le Secrétaire général, qu’en tout état de cause le recours administratif était tardif. En effet, selon les EE, ce dernier aurait du être introduit mutatis mutandis dans le délai de 2 semaines après publication des décisions litigieuses d’octobre 2003 et de mars 2004.
A titre infiniment subsidiaire, les EE relèvent que le recours était irrecevable, car contraire au principe de l’autorité de la chose jugée, pour les requérants qui figureraient au nombre des 65 parents ayant été déboutés en 2004.
Enfin, les EE se réfèrent aux propos des requérants, faisant valoir qu’à l’époque de leur adoption, il n’existait aucune possibilité de contester les décisions litigieuses du Conseil supérieur. Ils les réfutent en arguant qu’une évolution jurisprudentielle ne peut faire renaître un délai de recours déjà expiré ni remettre en cause une situation définitivement acquise.

10. Les EE réfutent ensuite les trois moyens des requérants opposés à la décision du Secrétaire général de déclarer leur recours administratif non fondé
– en ce qui concerne le premier moyen, les EE le considèrent sans pertinence, vu qu’il résulte d’une jurisprudence constante de la Chambre de recours, qu’ils précisent dans leur mémoire, que les parents ne peuvent en l’espèce utilement invoquer la violation d’un intérêt supérieur de l’enfant, essentiellement quant à la question de la proximité géographique de l’école et du domicile et des conditions de transport. Quoique la jurisprudence visée concerne la situation spécifique de Bruxelles, elle est parfaitement transposable au cas des écoles à Luxembourg. Les EE ajoutent encore que la question de la proximité géographique est par ailleurs totalement étrangère au choix d’une répartition verticale ou horizontale ;
– en ce qui concerne le deuxième moyen des requérants, les EE le réfutent en arguant que sa mission d’assurer une « éducation en commun » des enfants des agents de l’Union fonde sans doute, dans le chef de ces enfants, un droit subjectif à la fréquentation des EE, mais non un droit subjectif à fréquenter un site sur lequel se retrouvent toutes les sections linguistiques. Aucune disposition normative n’impose que la préoccupation pour la richesse linguistique et culturelle ne soit atteinte par la présence de toutes les sections dans toutes les écoles
– en ce qui concerne le troisième moyen, les EE rejettent l’accusation de discrimination en soulignant que dès que deux écoles sont ouvertes, il convient de répartir les élèves et donc de choisir des critères objectifs et raisonnables pour cette répartition, afin d’atteindre d’une manière proportionnée les buts légitimes poursuivis. A la lumière des importantes contraintes pesant sur elles, les EE estiment donc légitime de prendre les mesures nécessaires pour rationaliser les coûts et optimaliser les ressources, tant matérielles qu’humaines. En se référant à la jurisprudence précitée de la Chambre de recours du 27 août 2010, les EE concluent que la mesure d’une répartition « verticale » prise par le Conseil supérieur, ne saurait être regardée comme disproportionnée à l’objectif légitime poursuivi. Enfin, les EE observent encore que la présence des sections linguistiques allemande, anglaise et française sur les deux sites, s’explique par le fait qu’il s’agit des sections les plus peuplées et que le choix de la répartition des autres sections n’est pas arbitraire, car il a du tenir compte de et optimaliser les possibilités de choix des deuxième, troisième et quatrième langues, offertes par le Règlement général.

11. En conclusion, les EE demandent dès lors à la Chambre de recours de déclarer le recours irrecevable et non fondé, d’en débouter les requérants et de les condamner aux dépens, évalués ex aequo et bono à la somme de 1.000 E.
12. Dans leurs observations en réplique du 8 novembre 2012, les requérants maintiennent leurs prétentions initiales en répondant point par point à l’argumentation développée par les EE, le cas échéant par des interrogations. A cette fin et à part quelques précisions factuelles, ils développent de manière plus extensive les arguments déjà utilisés dans leur requête, tout en y ajoutant quelques nouvelles observations. Ainsi, quant à la prétendue expiration du délai de recours administratif, ils précisent que leur demande porte sur des faits nouveaux postérieurs à l’adoption des décisions litigieuses du Conseil supérieur, à savoir qu’il s’agit de faire cesser des problèmes dont ils ont actuellement à souffrir et de dénoncer le refus obstiné de la Direction des EE à y remédier, alors que, conformément à l’article 6 du Règlement général, cette dernière est dans l’obligation de le faire. A remarquer encore que, s’agissant de l’intérêt supérieur de l’enfant, les requérants reprochent aux EE d’invoquer à fin de comparaison une jurisprudence de la Chambre de recours qu’ils considèrent inapplicable en l’espèce, en ce que les situations des écoles européennes à Bruxelles et à Luxembourg ne présentent aucune mesure commune. Pour le reste, en réponse au reproche des EE, les requérants s’efforcent de démontrer par une longue explication illustrée d’une annexe volumineuse, la dangerosité des conditions de transport vers Luxembourg II.

13. Les EE ont déposé à l’audience deux comptes rendus du « Steering group — EE Luxembourg II» (réunion n° 5 du 10 décembre 2003 et réunion n° 6 du 25 mai 2004), et les requérants ont déposé le surlendemain de l’audience une pièce complémentaire (quotée n° 37).

Appréciation de la Chambre de_recours

Sur la recevabilité du recours contentieux
14. Il n’est pas contesté que 4 des 22 requérants, à savoir Mme Marinela Cavassa Mattea, M. Richard Dobias, Mme Dagmar Dobiasova et M. Sandor Valkovszky, ne figuraient pas au nombre des auteurs du recours administratif formé devant le Secrétaire général des Ecoles européennes. Ces 4 requérants ne sont donc pas recevables à contester devant la Chambre de recours la décision attaquée.
Il s’ensuit que le présent recours contentieux n’est recevable qu’en tant qu’il émane des 18 autres requérants.
Sur la légalité de la décision attaquée
15. Il ressort des motifs de la décision attaquée que le recours administratif des intéressés a été rejeté par le Secrétaire général comme étant irrecevable et, au surplus, non fondé.
A ce dernier égard, l’examen des moyens de fond soulevés par les requérants conduit à considérer que c’est à bon droit qu’ils ont été écartés par le Secrétaire général.

> En ce qui concerne le premier moyen
16. Il résulte de la jurisprudence constante de la Chambre de recours depuis son arrêt du 30 juillet 2007 rendu sur le recours 07/14 que, si le principe de l’intérêt supérieur de l’enfant fait partie des principes fondamentaux devant servir de référence à l’action des organes des Ecoles européennes, un tel principe ne saurait être regardé comme méconnu pour la seule raison que les requérants n’ont pu obtenir l’inscription de leurs enfants dans l’école la plus proche de leur domicile ou de leur lieu de travail.

17. A cet égard, il convient de rappeler que, s’il découle clairement des objectifs de la convention portant statut des Ecoles européennes un droit d’accès des enfants des personnels des institutions européennes à l’enseignement dispensé dans les Ecoles européennes, un tel droit ne saurait impliquer nécessairement qu’il soit exercé dans l’école de leur choix en fonction de la seule considération de la localisation de leur domicile ou de leur lieu de travail et de l’organisation des trajets.

18. En effet, le système des Ecoles européennes, qui ne peut pas être comparé aux systèmes nationaux d’éducation, dispose d’un nombre limité d’établissements implantés dans des villes sièges d’institutions ou d’organismes européens avec l’accord dés autorités nationales et non d’un réseau permettant, au sein de ces villes, d’assurer à l’ensemble des élèves concernés, quelle que soit la localisation de leur domicile, un enseignement de proximité.

19. Il convient d’ailleurs d’observer que, dans les villes où il n’existe qu’une seule école européenne, les distances entre cette école et le domicile des élèves ou le lieu de travail de leurs parents peuvent s’avérer, au cas par cas, aussi importantes que celles qui sont mises en cause dans le présent recours, sans pour autant, en raison de l’existence d’une seule école, que la question ne soit posée.

20. Lorsqu’il existe plusieurs écoles dans la même ville, comme c’est le cas dorénavant à Luxembourg, la localisation géographique de chacune d’elles, qui ne dépend d’ailleurs pas du seul Conseil supérieur des Ecoles européennes puisqu’elle nécessite l’accord de l’Etat membre d’accueil, ne peut, en raison de la liberté de domiciliation des intéressés, constituer le critère exclusif d’exercice du droit d’accès à l’enseignement dispensé dans ces écoles.
Il s’ensuit que le premier moyen doit être écarté.

En ce qui concerne le deuxième moyen
21. S’il est vrai que l’article ler de la convention portant statut des Ecoles européennes définit la mission de celles-ci comme “l’éducation en commun des enfants du personnel des Communautés européennes”, une telle stipulation n’implique nullement que toutes les écoles comprennent l’ensemble des sections linguistiques correspondant aux langues officielles des Etats membres.

22. En effet, la richesse linguistique et culturelle que sous-tend la mission incombant aux Ecoles européennes découle de la cohabitation de plusieurs des sections correspondant notamment aux langues les plus couramment utilisées en Europe, sans qu’il soit possible d’exiger, eu égard un nombre de plus en plus important d’Etats membres, l’existence dans chaque école de la totalité des sections linguistiques.

23. A cet égard, la présence dans chacune des deux écoles de Luxembourg, aux côtés des sections de langue anglaise, de langue allemande et de langue française, respectivement de dix et de huit autres sections linguistiques, permet, à l’évidence, d’assurer l’enseignement commun exigé par la stipulation invoquée.

Le deuxième moyen doit, dès lors, être également écarté.

En ce qui concerne le troisième moyen
24. En soutenant la violation des principes d’égalité et de non discrimination, les requérants ne démontrent pas en quoi l’ouverture d’une nouvelle école sur le site de Bertrange-Mamer, disposant de locaux entièrement neufs et de toutes les infrastructures nécessaires, constituerait pour les élèves qui y sont inscrits un “traitement défavorable” par rapport à ceux qui sont inscrits à l’école implantée sur le site du Kirchberg. Ceux de ces derniers qui résident dans les quartiers ou les localités les plus éloignés de ce site pourraient manifestement soutenir l’argumentation inverse.

25. En outre, la répartition dite “horizontale”, préconisée par les requérants, qui serait d’ailleurs contraire à l’article 3 de la convention portant statut des Ecoles européennes, selon lequel “l’enseignement donné dans chaque école couvre la scolarité jusqu’à la fin des études”, entrainerait les mêmes difficultés que celles invoquées pour les enfants les plus jeunes en ce qui concerne ceux de ces enfants qui résident dans les quartiers ou localités les plus éloignés du seul site où serait implanté les cycles maternel et primaire.

26. Enfin, il ne ressort nullement de la répartition retenue que celle-ci “avantagerait” d’une manière générale les pays du nord de l’Europe, dont les sections linguistiques seraient affectées à l’Ecole européenne de Luxembourg I, au détriment des pays du sud, dont les sections seraient affectées à celles de Luxembourg II. Alors même qu’il n’est pas démontré en quoi ces derniers seraient “désavantagés”, il suffit, à cet égard, de constater que l’école de Luxembourg I comporte les sections de langue espagnole et de langue portugaise, dont les pays ne sont pas précisément situés au nord de l’Europe, tandis que celle de Luxembourg II comporte les sections de langue danoise, de langue tchèque et de langue slovaque, dont les pays ne figurent pas au nombre des plus méridionaux.
Le troisième moyen doit, dès lors, être aussi écarté.

27. Il résulte de ce qui précède que, les requérants n’étant pas fondés à soutenir l’illégalité du rejet au fond de leur recours administratif, il est inutile d’examiner la question de la recevabilité de ce recours. Le recours contentieux de M. Mackenzie et autres requérants ne peut, dès lors, qu’être rejeté.
Sur les frais et dépens

28. Aux termes de l’article 27 du règlement de procédure : « Toute partie qui succombe est condamnée aux frais et dépens s’il est conclu en ce sens par l’autre partie. Cependant, si les circonstances particulières de l’affaire le justifient, la Chambre de recours peut mettre les frais et dépens à la charge de cette dernière ou les partager entre les parties (…) A defaut de conclusions sur les dépens, chaque partie supporte ses propres dépens. ».

29. Les Ecoles européennes n’étant pas la partie qui succombe et ayant demandé expressément la condamnation des requérants aux frais de procédure, évalués ex aequo et bono à la somme de 1.000 E, il convient d’accéder à cette demande.

PAR CES MOTIFS, la Chambre de recours des Ecoles européennes
DECIDE
Article 1: Le recours de M. Mackenzie et autres requérants, enregistré sous le n° 12/74, est rejeté.

Article 2 Les requérants verseront aux Ecoles européennes au titre de frais et dépens la somme de 1.000 €

Article 3: La présente décision sera notifiée dans les conditions prévues aux articles 26 et 28 du règlement de procédure.
H. Chavrier E. Menéndez-Rexach P.Rietiens
Bruxelles, le 19 décembre 2012
Le greffier
Andreas Beckmann

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